Vœux du curé à la paroisse pour l’année 2016

Comme l’a souligné notre Pape François, le 1er janvier 2016, chacun est appelé en cette année du Jubilé de la Miséricorde à découvrir le visage miséricordieux du Père : patient, Il nous permet toujours de nous relever et de nous renouveler. L’année 2015 a été marquée en son commencement et en sa fin par des événements tragiques mais aussi par des signes et des attitudes concrètes de solidarité et de générosité, que ce soit lors des attentats ou des inondations d’octobre. 2016 attend que nous nous relevions et que nous nous renouvelions.

Comme disciples de Jésus, nous devons tenir dans notre fidélité au Christ et dans notre espérance du Salut : « La Lumière est venue dans notre monde et les ténèbres ne l’ont pas arrêtées » (cf. Jn 1). Il est à noter que la reine Elizabeth II lors de son message traditionnel de Noël ait explicitement fait référence cette année à ce passage de l’Evangile selon Saint Jean.

Le Pape François nous invite ainsi combattre pour la paix que Dieu souhaite semer dans le monde, combattre pour ne pas laisser ces ténèbres masquer ou détourner les hommes de cette Lumière qui est la Vie en Dieu. Cela implique de lutter contre l’indifférence, de prendre soin de nos frères dans le besoin, de prendre soin de nos frères et du monde qui nous entoure.

Ce combat n’est pas un combat idéologique. Il ne s’agit pas non plus simplement ou uniquement d’un combat culturel ou sociologique. Beaucoup voudraient faire porter aux religions le poids des difficultés et des drames qui émaillent et défigurent nos sociétés et de nombreuses personnes.

Les différents débats qui ne cessent de remplir nos esprits, parce qu’ils remplissent l’actualité et l’espace médiatique, nous détournent souvent de la réelle exigence que le Christ est venu apporter : la Lumière dans le monde.

J’ai ici une pensée particulière pour nos frères éprouvés par la solitude, la maladie ou le mal-être, pour nos frères confrontés à la folie des hommes et à la guerre, pour nos frères Chrétiens Persécutés comme pour ceux qui subissent de nombreux conflits.

Je ne cesse de voir à chaque page de nos journaux, sur internet, à la radio ou sur nos écrans, cette volonté, je n’oserai dire cette manipulation, qui consiste à faire de la peur l’art de gouverner. Cette peur se lit dans toutes les dimensions de notre vie : la peur en l’avenir, la peur dans le travail, la peur de la guerre, la peur en politique dès que des élections approchent, et malheureusement aussi la peur dans les familles, fragilisées par de nombreux échecs, éprouvées par le manque de sens et la volonté de redéfinir sans cesse ces repères pourtant si nécessaires à la construction des personnes. Qui peut dire aujourd’hui ce qu’est une famille, ce qu’est un travail où l’humain s’épanouit, où l’action politique mérite d’être reconnue comme visant réellement le Bien Commun et non l’avenir et la réussite de quelques uns ?

La peur nait du danger, réel ou simulé, et engendre un manque de confiance, je dirai même de foi : notre pays et nos communautés ont-elles encore foi en l’avenir, en la politique, en la religion, en la science, en la médecine… ?

Je m’attacherai à revenir sur un point en particulier qui peut se conjuguer à tant d’autres événements de cette annus horibilis qui vient de s’achever.

Sans citer une religion ou une pratique particulière, l’association des maires de France a insisté, par l’entremise de son guide de « bonne conduite laïque » à destination des élus locaux, sur « la neutralité » nécessaire en matière de religion dans l’espace public. La question des menus à la cantine, et des crèches étaient également au programme.

Pour l’archevêque de Paris, Mgr Vingt-Trois ce guide est un réflexe immédiat après les attentats de janvier et de novembre, « mais ce n’est pas une réponse en profondeur ». Le cardinal estime en effet que l’on « ne va pas changer les pensées et les modes d’approche en faisant de la laïcité une sorte de système d’interdits par lequel on empêcherait de s’exprimer les convictions d’un certain nombre de gens ». Par peur de la religion, la laïcité ne s’entendrait plus comme une présence de la religion dans la société mais par ce souhait de neutralité, certains voudraient plutôt dans la laïcité une absence voire un effacement de la religion.

Quelques soient les questions ou les sujets qui agitent nos consciences, je fais miens ses propos qui considèrent qu’il « serait une illusion de croire que l’on peut réfréner des tentations de radicalisation en durcissant les règles de telle façon que les gens se trouvent radicalisés ». Cela ne vise pas que l’Eglise. D’après le cardinal Vingt-Trois, « ce projet militant ne combat pas seulement le catholicisme comme une cible privilégiée » mais « vise aussi à l’élimination de toutes les religions de l’espace public et notamment de la religion musulmane ».

L’archevêque de Paris a décrit de fait la société sécularisée en France, comme « une société où les références chrétiennes ne sont plus reconnues comme repères de la culture commune ». « En fait, nous ne sommes pas seulement devant un effacement culturel des références chrétiennes. Nous sommes devant un projet militant [qui feint] de craindre que l’Église puisse exercer un pouvoir occulte… il exprime [aussi] la difficulté des hommes à reconnaître une véritable transcendance ». La transcendance serait donc nuisible car elle échapperait à la compréhension, à la maîtrise par l’homme. La transcendance fait peur et plutôt que d’apporter de la lumière aux hommes, elle jetterait un voile qui obscurcirait sa capacité à s’affirmer par soi-même.

Malgré la méconnaissance, l’injustice, voire la brimade et la persécution, nous ne devons pas sombrer dans la passion ou l’émotion. Notre pays, fier de sa devise, notre foi, forte de cette liberté d’aimer à laquelle nous exhorte le Christ, nous permettent de ne demander rien de plus que ce qui est le droit commun : la liberté de conscience, la liberté de culte et la liberté d’expression garanties par la Déclaration Universelle des droits de l’Homme. « Et nous demandons que ces libertés soient respectées non seulement pour les chrétiens mais aussi pour tous les autres et non seulement dans notre pays mais dans tous les pays. »

Nous avons à apporter là où nous sommes ce désir qui veut plus qu’une société seulement basée sur le consensus a minima comme marque de son “vivre ensemble” et qui craindrait les choix particuliers qui l’obligent à réfléchir et à se remettre en question, ou plutôt en lumière… Notre société ne peut pas se construire sur des minima communs, car elle risquerait inéluctablement de se briser dès que les failles qu’elle contient éclateraient sous le poids d’évènements trop lourds voire trop exigeants ou trop violents. Notre société ne peut se construire et grandir que sur des maxima communs.

Il en va de même pour l’Eglise. La Lumière que nous donne le Christ ne nous permet pas de sombrer dans le communautarisme qui ne se défendrait qu’à cause d’une “christianophobie”. La Lumière du Christ nous rappelle à la mission de l’Église. Il nous faut de ce fait sans cesse surmonter l’appréhension de sortir de nos cercles habituels et d’oser annoncer le Christ : cette mission avec Jésus, dans la force de l’Esprit Saint qui a libérés les Apôtres de la peur lors de la Pentecôte et que nous avons reçu à notre baptême et confirmé dans notre désir de suivre le Christ, nous permet d’éprouver à notre tour non plus la peur mais la joie de l’annonce de l’Évangile.

Ce qui définit l’Eglise, ce qui constitue sa mission, ce ne sont pas les modalités de prospection, ni les aspirations de certains, qui par esprit passéiste ou par volonté ou illusion novatrices, cherchent plus une Eglise rassurante et à leur image. Ce qui définit l’Eglise, c’est le contenu de son message : l’annonce de Jésus de Nazareth, Fils de Dieu fait homme, né dans l’histoire, mort crucifié et ressuscité pour donner la vie même de Dieu au monde ; Verbe fait chair, Lumière faite homme pour être la vie au monde.

S’il est beau de s’échanger des vœux au début de l’année, il est nécessaire de faire dans ce renouvellement plus qu’un désir réciproque pour que l’avenir soit meilleur, ou que les peurs s’effacent comme par enchantement.

Nous avons à croire dans la Vie, même si de nombreux problèmes d’hier demeureront demain. «Portés par une espérance réelle», nous devons sans cesse (ré)apprendre à laisser Dieu poser sur nous son regard pour que nous puissions nous réjouir, conscients que chaque jour son visage miséricordieux, plus radieux que le soleil, resplendit sur nous (cf. Nb).

Je vous souhaite ainsi de tenir fermes dans l’espérance ; je vous souhaite de vivre sans cesse cette présence lumineuse de l’amour de Dieu en Jésus Christ ; je vous souhaite une année où notre foi se renforce chaque jour dans les bons ou mauvais moments. Je vous souhaite d’avoir ce cœur pauvre qui sait s’ouvrir à la Miséricorde de Dieu et apprend à être fort dans le don de soi. Que cette année 2016 soit marquée pour chacun par cette Lumière, par cet Amour inépuisable de Dieu, vainqueur du mal et des ténèbres.

Bonne Année à tous.

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